Albioma en difficulté avec la géothermie

Après avoir été étudiée à plusieurs reprises, la géothermie à La Réunion pourrait enfin devenir une réalité. Le permis exclusif de recherches de gîtes géothermiques attribué à Albioma le 7 mars par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle, ouvre des perspectives intéressantes. Ce permis concerne une zone de 80 km2 autour du piton des Neiges dans les cirques de Salazie et Cilaos, en dehors du Parc national. Albioma, déjà propriétaire des centrales thermiques de Bois-Rouge et du Gol, considère cette zone comme la plus prometteuse de l’île par rapport à d’autres zones géothermiques. La société Engie a également déposé une demande de permis pour la Plaine-des-Cafres et le piton de la Fournaise.

OÙ FORER ?

Diverses campagnes de recherche ont été menées depuis les années 70. Le BRGM a réalisé un forage à Salazie en 1985-1986, atteignant plus de deux kilomètres de profondeur et mettant en évidence une température dépassant les 190 °C, largement suffisante pour une exploitation géothermique. Cependant, le manque d’eau nécessaire à la production d’électricité a été un obstacle. Albioma, après l’acquisition de deux centrales géothermiques en Turquie en 2021 et 2022, est confiante dans les avancées technologiques et les techniques de forage modernes. La société envisage de reprendre les recherches là où le BRGM s’était arrêté en 1986, en se concentrant sur des sites stratégiques au sein du massif.

La région de Cilaos présente également un fort potentiel. Selon une thèse réalisée en 2020 par Bhavani Bénard à l’université de La Réunion, la température des eaux thermales de deux sources dépasse les 150 °C, atteignant même 210 °C. Ces résultats encourageants laissent envisager des débits d’eau suffisants pour une exploitation commerciale. Albioma est convaincue du potentiel réel de ces zones géothermiques, notamment grâce aux nombreuses sources thermales présentes dans les cirques de Salazie et Cilaos, qui sont des indicateurs de l’existence d’un système hydrothermal développé sous le piton des Neiges. La prochaine étape consistera à déterminer les emplacements des forages et le nombre de puits à réaliser.

COMPENSATION FINANCIÈRE EN CAS D’ÉCHEC

Le coût d’un forage est estimé à 5 millions de dollars par Albioma. Bien que la technique de forage soit maîtrisée, la roche volcanique réputée pour sa dureté peut poser des défis. La société demande une compensation financière en cas d’échec des recherches, une pratique déjà en vigueur en France métropolitaine et qu’elle souhaite voir étendue à l’Outre-mer. Cette demande est actuellement examinée par la Commission de régulation de l’énergie, avec une validation possible dans l’année. En métropole, l’Ademe gère un fonds dédié à la géothermie profonde avec une indemnisation maximale de 17 millions d’euros par projet.

UNE PREMIÈRE USINE DANS 8 ANS ?

Le plan d’action d’Albioma s’étend sur au moins cinq ans, conformément au permis de recherche. La société devra obtenir la maîtrise foncière des terrains, construire des infrastructures d’accès, réaliser des études d’impact et obtenir les autorisations de forage de la préfecture. Avec le soutien des collectivités locales, Albioma espère commencer les forages d’ici 2027. Ensuite, il faudra passer à la phase opérationnelle, analyser les données des forages et estimer la puissance électrique potentielle en fonction de la température et du débit d’eau. Cette puissance pourrait se situer entre 5 et 15 mégawatts, ce qui, bien que modeste par rapport à d’autres sources d’énergie de l’île, représente un pas significatif vers une transition énergétique durable. Si le potentiel géothermique est confirmé, la première usine pourrait voir le jour dans environ 8 ans, marquant un investissement à long terme pour Albioma.

L’entreprise poursuit ainsi ses efforts dans le domaine des énergies renouvelables, avec des projets similaires à Mayotte, sur Petite-Terre et en Guadeloupe. Malgré les coûts initiaux importants, les usines géothermiques offrent une source d’énergie stable et peu coûteuse à exploiter et entretenir, fonctionnant plus de 90 % de l’année.

COMMENT ÇA MARCHE ? Le principe de la géothermie est simple. Il s’agit de capter en profondeur des eaux très chaudes qui vont partiellement se transformer en vapeur en remontant à la surface. Cette vapeur est dirigée vers une turbine couplée à un alternateur où son énergie es…